L’Elan publie cet automne une biographie d’Astrid Lindgren. Ce texte pourrait être vraiment bienvenu, tant les écrits en français sur la vie de l’écrivaine suédoise sont rares, mais il se révèle finalement décevant. Thierry Maricourt signe cette biographie, l’auteur de Frérot frangin s’empare de la vie d’Astrid Lindgren, ou plutôt de sa plume pour nous livrer le récit d’une vie à la première personne.
Dans cette biographie, T. Maricourt retrace brièvement les événements de la vie de A. Lindgren, se focalisant davantage sur les héroïnes et héros de ses œuvres : Fifi Brindacier, Emil (ou Zozo, selon les traductions), Ronya, etc.
Un récit à la première personne… Ce choix étonne, on s’attend alors à un récit intimiste or, il n’en est rien. Le ton de T. Maricourt est léger même quand il aborde les événements les plus graves de la vie d’A. Lindgren. Est-ce dû au choix de l’auteur ou à un manque de sources sur la vie de l’écrivaine suédoise ? Au fil des pages, la figure d’A. Lindgren tend à s’effacer devant celles de ses héroïnes et héros. Astrid Lindgren était une femme de plume et une femme de convictions, elle a mené de nombreux combats notamment pour les droits des enfants, des animaux, etc., malgré cela la voix de Fifi se fait ici plus forte que la sienne.
Au final on en sait peu sur cette femme devenue mère (célibataire) très tôt, forcée de confier son enfant à une famille d’accueil car elle ne peut subvenir à ses besoins – comment vécut-elle cela ? – car le récit de T. Maricourt ne mentionne ces faits qu’en passant, comme s’il voulait que cette biographie soit d’un ton aussi léger que celui des récits de Fifi. Et que dire de ce thème sans cesse ressassé du refus de grandir, était-ce vraiment la plus grande préoccupation de l’écrivaine (ou est-ce l’amalgame de la posture de ses personnages) ? On aurait aimé connaître les liens plus intimes entre sa vie et son œuvre…
A propos de son œuvre… La biographie nous présente tour à tour les principaux personnages des romans d’A. Lindgren, offrant donc un panorama commenté des soi-disant intentions de l’auteur. On aurait aimé y apprendre des faits plus marquants, comme par exemple que la version originale de Fifi – précédent la première édition – était beaucoup plus caustique et que les allusions au nazisme y étaient beaucoup plus explicites.
Le problème de cette biographie est peut-être une question de distance. A force de donner un ton léger et humoristique à son récit, T. Maricourt lui ôte toute profondeur, et à son style faussement autobiographique on peine à éprouver de l’empathie pour l’écrivaine. Peut-être tout est-il déjà dit dans le titre « A propos d’une vieille dame facétieuse » alors qu’on aurait voulu entendre parler d’une « grande » dame – fut-elle facétieuse – dont l’empreinte a tant marqué la littérature pour la jeunesse. Astrid Lindgren méritait mieux.