Faites des gosses !

livre-enfant-quand-tu-seras-grand

Spéciale dédicace à tous les parents. La vie avec des gosses c’est pas le rêve tous les jours mais que serait-on sans eux ?

Voici une petite sélection d’albums récents sur le thème de la parentalité qui ont attiré mon œil.

Je vous suggère de débuter votre lecture par l’album Big Bang Pop ! (ed. Atelier du Poisson Soluble) dont le titre pétille dans la bouche autant que les illustrations vous feront pétiller les yeux. Claire Cantais, reine des coups de ciseaux dans le Canson coloré vous fait ici une belle leçon qui part du big bang à la naissance du bébé à qui vous offrirez cette merveille ! Des couleurs et des onomatopées de partout ornent cet album singulier.

Pour les parents déjà un peu plus avancés dans cette grande aventure je vous conseille de jeter un œil à l’album Comment élever un Raymond (ed.Sarbacane), drôle de manuel d’élevage concocté par Marie de Lestrade et « vintagement » illustré par Marie Dorléans. Un Raymond késako ? On nous dit que c’est un genre d’animal,  fréquemment posé sur le canapé, que ça ne sent pas bon, que ça aime les chatouilles, que ça boit du lait, que ça n’aime pas le potiron… Un livre drôle et touchant sur les étapes de la parentalité jusqu’à ce que le Raymond vienne avec son Raymond à lui sonner chez vous ! Et là, ta-dam : grosse émotion.

Aux filles qui rêvent d’une petite sœur et même de milliers de petites sœurs pour faire les quatre cent coups je propos la lecture d’un album adorable : Petites sœurs de Tomo Miura aux éditions La joie de lire. Rarement j’ai vu des bouilles aussi mignonnes ! Des sourires qui dévorent le visage des personnages ornent toutes les pages. Et puis au final, être fille unique c’est bien aussi ! Trop chou comme dirait une amie bien plus jeune que moi.

Impossible de ne pas craquer pour le sublime Quand tu seras grand dans lequel Emily Winfield Martin semble avoir mis tout son talent et son amour des enfants au profit d’un album mémorable ! Un ouvrage qui me semble être un parfait cadeau de naissance, prompt à bouleverser bien des jeunes parents par sa beauté et son intelligence. Les éditions des éléphants nous proposent décidément de belles publications.

Enfin, pour survivre à toutes ces progénitures, je pense qu’il s’agit de conclure avec Maman robot (ed. Sarbacane) qui reprend le thème de la fameuse « charge mentale » tant à la mode. Zidrou au scénario vous met en garde ! Prenez soin de votre maman avant qu’elle ne se transforme en robot à tâches ménagères voire qu’elle ne se mette en grève…

 

Un album aux couleurs et motifs joyeux de Sébastien Chebret, comme une maman qui reçoit un collier de nouilles (sérieusement faites un effort la prochaine fois les enfants !)

 

 

Publicité

Au fond de la hotte…

Quelques livres créatifs et ludiques pour inspirer nos enfants toute l’année !

SAMSUNG CAMERA PICTURES

Mes couleurs, Iris de Moüy, Hélium, 2009, 13,50 €

Cet imagier arc-en-ciel signé Iris de Moüy amène le tout-petit à la découverte tactile des couleurs et des formes. En effet, l’album cartonné fonctionne comme un puzzle avec ses pièces détachables. Que cachent la pomme rouge, la botte de pluie jaune, la voiture bleue, la feuille verte, le canard orange, la fleur rose, la tablette de chocolat marron, le chat noir, le tee-shirt mauve, la coquille d’œuf blanche ? Chaque pièce colorée recto/verso réserve sa surprise ! L’enfant trouvera mille et une façons de prolonger le jeu : assembler les pièces du puzzle,  retrouver le nom de chaque couleur récapitulé à la fin du livre, utiliser les formes comme des pochoirs pour dessiner etc.

SAMSUNG CAMERA PICTURES

91YkXZKBAeL._SL1500_

Le voyage merveilleux, Maurice Carême, Lauranne Quentric (ill.), Collection Juvenilia chez Mouck, 2011, 15 €

La collection Juvenilia chez Mouck se propose de mettre en lumière les écrits de jeunesse d’écrivains reconnus tels que Victor Hugo, Arthur Rimbaud, Alphonse Daudet, Emile Zola, Gustave Flaubert, Lewis Caroll ou Mark Twain. Le voyage merveilleux reprend 4 poèmes rédigés par le belge Maurice Carême, toujours lu et apprécié à l’école, entre ses 17 et ses 22 ans. Le Ciel, L’Etang, Le Minet et Le Pigeonnier  ont été publiés dans son tout premier recueil en 1925 intitulé 63 illustrations pour un jeu de l’oie ; ce qui a sans doute donné l’heureuse idée à Lauranne Quentric de créer son propre jeu de l’oie en fin d’ouvrage.  Celui-ci répond à une règle du jeu originale, le gagnant étant déclaré « Roi des poètes ». Seul regret, la petite taille de la planche à jouer qui reprend certains détails des illustrations de la jeune femme… qui a pour ce titre travaillé le collage.

03041201

Cet album empreint d’une infinie douceur – bienvenue en cette période hivernale – nous transporte dans l’univers de la poésie ou du moins permet aux enfants d’y faire leurs premiers pas. On saisit bien le principe du voyage, du cheminement grâce aux différents cadrages des doubles pages ; l’enchaînement de ces doubles pages formant une séquence. Le passage d’un texte à l’autre se fait par la présence de cette petite fée rassurante.

03041202

Focus sur des cahiers d’activités atypiques proposés par Les Grandes Personnes. Parce que lire de beaux albums donne bien souvent envie de se ruer sur son pot à crayons, quoi de mieux que des livrets à colorier tout spécialement crées par des illustrateurs pour leurs jeunes lecteurs?

D’une part, il y a les livres de coloriages à flaps agrémentés d’un protège-cahier de Joëlle Jolivet. Toutes les planches grand format sont réalisées en linogravure. Le premier, Coloriages, a été originellement publié chez feu Panama. Après la faillite de l’éditeur, Brigitte Morel a crée la maison d’éditions Les Grandes Personnes et a notamment souhaité republier ce titre. On prend un plaisir fou à soulever les rabats révélant une portée de canetons sous l’aile de leur mère ou des papillons cachés dans des fleurs. Le documentaire Costumes a également été réédité, donnant l’envie à l’artiste de prolonger l’aventure par le biais d’un nouvel album à colorier : Costumes à colorier. On peut y découvrir les dessous de 16 personnages emblématiques et les mettre en couleurs tels que le cowboy, le chevalier, la princesse ou le pirate.

SAMSUNG CAMERA PICTURES 

Coloriages, Les Grandes Personnes, Joëlle Jolivet, 2010, 9,50 €

SAMSUNG CAMERA PICTURES

 71gbG6G7c-L._SL1206_  81po17VO+AL._SL1109_

+ Costumes à colorier, 2013, 11,50 €

D’autre part, il y a les cahiers de Pascale Estellon. Ici, même formule avec de grands formats et protège-cahiers mais c’est davantage une initiation à l’art du coloriage et une familiarisation à la couleur qu’on nous présente. Grâce à de petits conseils techniques et des exemples simples, on se lance à colorier à l’aide de lignes, de points, de carrés, de chiffres ou de lettres puis à partir des couleurs primaires, on crée sa propre palette de couleurs !

coloriage-pascale-estellon-718x1024

Cahier pour apprendre à colorier autrement, Pascale Estellon, Les Grandes Personnes, 2013, 12,90 €

Editions Les Grandes Personnes_8 140

+ Cahier de peinture pour apprendre les couleurs, 2010,12,90 €

415NyNSyVaL

Ma maison à décorer, Laurence Broydé, Le vengeur masqué, 2013, 17 €

41S1KfhAWDL

Il s’agit là d’un objet hybride comme on les aime ! A la fois livre, livret de coloriages, pop-up et maison de poupée, le mieux est de vous laisser découvrir cette courte vidéo en guise de mode d’emploi…

81R+EbRVypL._SL1500_

Pour faire un livre, Alain Serres, Solenn Larnicol (ill.), Rue du monde, 2013, 17 €

Ce livre accordéon dévoile aux enfants à partir de 5 ans la chaîne de fabrication du livre et explique comment en faire un soi-même. Solenn Larnicol explique sur son blog que sur la face A, les acteurs du livre se tiennent par la main, on part donc de l’auteur en passant par le graphiste, l’imprimeur, le distributeur…jusqu’au lecteur. Sur la face B, nous avons un mode d’emploi qui explique aux enfants comment ils peuvent, de manière simple, fabriquer leur propre petit livre.

51YFnKlvaBL

Tip tap, mon imagier intéractif, Anouck Boisrobert et Louis Rigaud, Hélium, 2011, 17,20 €

Pour une fois, on reprend la présentation de l’éditeur qui donne l’eau à la bouche ! Tip tap allie livre et ordinateur pour offrir aux enfants un incroyable jeu d’initiation aux mots. Ici, le livre et le CD-Rom sont indissociables. L’enfant lance le jeu sur l’ordinateur puis tape sur son clavier les lettres du mot qu’il a choisi dans l’imagier : l’image associée apparaît instantanément à l’écran. À notre démiurge en herbe de compléter et d’animer la scène en donnant vie aux quelques 200 mots du livre. Agrandir ou rapetisser les éléments, changer leur couleur, faire tomber la nuit, la neige, accélérer ou ralentir la vitesse des animaux et des véhicules, écouter les mots ou un air de guitare… une infinité de possibilités s’ouvre à l’enfant pour créer des univers loufoques et fantastiques, chaque fois uniques, tout en s’initiant à l’écriture et à la lecture. Avec, en bonus, quelques petites surprises visuelles « cachées » dans le lexique de cet ouvrage très graphique, qui enchanteront tous les connaisseurs des livres de ces talentueux artistes (écrire « hélium » ou « multicolore » par exemple). Une fois la scène composée, il est toujours possible de l’enregistrer ou de l’imprimer !

picto-191

Les cocottes à histoires, Agnès de Lestrade, Christine Roussey (ill.), Milan, 2012, 15,50 €

SAMSUNG CAMERA PICTURES

Enfin voilà un petit bijou de créativité, de quoi lancer l’imagination fertile des enfants en voiture, en train, en famille ou même en classe! Alors, la cocotte en papier, c’est un origami auquel on a tous joué dans la cour de récré…Là, Les cocottes à histoires rassemble dans un joli classeur illustré par la farfelue Christine Roussey 9 fiches proposant des règles du jeu inventives avec un exemple d’histoire proposé par Agnès de Lestrade qui mêle ici son expérience d’auteur pour la jeunesse à celle de créatrice de jeux de société, chez Ravensburger ou Djeco notamment. « Le mot secret », « Si j’étais », « C’est toi le chef », « Le jour où » ou encore « Les mots bizaroïdophormes » sont quelques-unes des thématiques suggérées pour amorcer la trame des histoires. Il y a aussi une pochette où ranger les 9 cocottes du jeu à plier + 7 cocottes vierges à s’approprier sans oublier la cocotte en feutrine qui sert de buzzeur pour rythmer les parties et les rendre plus drôles! Pouët! Pouët! Pouët! On pourra apprendre à fabriquer sa propre cocotte, on songera à combiner les règles de plusieurs cocottes et à créer des jeux inédits, en solitaire, à plusieurs ou même en équipe! Un régal autour des mots que les dessins colorés de Christine Roussey prolongeront avec délice…

SAMSUNG CAMERA PICTURES

Un petit tour chez Agnès de Lestrade

J’ai envie de partager trois lectures pour dresser un peu le portrait d’une auteure qui réussit ce subtil mélange de me chahuter, de me chagriner, de me « choquer » et de me charmer.

3 romans, bien différents par leur impact et leur ton (du pus grave au plus léger) mais 3 romans qui offrent quelques constantes : des univers exclusivement féminins ou presque. L’héroïne y est, chaque fois, une jeune fille charismatique et vive d’esprit.  La mère, personnage secondaire, y a une place essentielle : elle peut-être cruelle, triste, bienveillante, douce ou joyeuse. Enfin la grand-mère, figure féminine forte, est un point d’ancrage pour nos jeunes héroïnes : grand-mère refuge et  grand-mère souvenir.

Bref chez Agnès de Lestrade, l’univers féminin se décline tout en nuances : gai, triste, léger, torturé, pensif, rêveur, nostalgique, égocentrique, généreux, joyeux et vivant, terriblement vivant !

Les mots qui tuent.

 Le titre de ce roman, n’est pas seulement une métaphore bien choisie ; il cache un véritable drame.

Mara est une collégienne taciturne. Elle n’a jamais beaucoup aimé les mots qui se déploient au grand jour. Dans son quotidien, les mots enferment une telle violence qu’elle préfère les dissimuler dans son journal intime. Car oui, les mots qu’elle pense et qu’elle écrit sont cruels, particulièrement envers sa mère. Une mère plus préoccupée par ses créations de tissus que par sa création de chair. Sa fille n’est que le porte-manteau des vêtements qu’elle créé. Et quand on est un porte manteau il n’est pas facile de se faire des amies.

Mara est donc seule. Avec ses maux et ses mots.

Mais voilà, quand on est une adolescente, la solitude est pesante et on a besoin d’être aimée… à tout prix. Pour garder l’affection de sa seule amie et pour attirer l’attention d’une mère en abandon d’affection, Mara choisit donc d’être aimée, au prix de mensonges. Or le mensonge peut conduire au pire.

Oui les mots peuvent tuer.

C’est un roman court mais dense qui invite le lecteur à réfléchir à l’impact des mots. Des mots qui sont choisis avec précision et qui vous bousculent.

Il est difficile de s’identifier à la narratrice et de s’attacher à elle tant son acte désespéré d’amour est criminel. Pourtant, il est tout aussi difficile de la détester et de l’incriminer tant c’est une adolescente en misère affective. Mara est donc un personnage particulièrement intéressant. Cette ambivalence qu’elle provoque,  participe à perturber le lecteur.

Comme beaucoup d’œuvres d’Agnès de Lestrade, la lecture laisse un arrière gout de malaise. Quelque chose dérange… Certaines phrases claquent encore dans nos oreilles (oserais-je dire  dans notre conscience ?).

Les mots ne sont jamais anodins : une fois le livre refermé, on a envie d’en parler, d’échanger, de partager… N’est-ce pas le signe d’une belle réussite littéraire ?

Éditions Sarbacane, 64 pages, 5 €, dès 13-14 ans.

Mes yeux menthe à l’eau

« C’est à la mort de Granny que tout a commencé »… Évidemment il existe plus gai comme entrée dans un roman. Et je ne sais pas pourquoi cela me fait penser à la première phrase de l’étranger de Camus « Aujourd’hui maman est morte. ». La comparaison s’arrête là.

L’histoire ne verse ni dans l’absurde ni dans le pathétique. Au contraire, Nina se révèle une jeune héroïne pleine de ressources et d’entrain. Elle met de côté sa tristesse pour s’occuper de sa maman accrochée à son lit  et à son chagrin et l’aider à retrouver le sourire. Un autre personnage féminin fait alors son entrée : l’amie essentielle. Celle qui ne refuse aucun sacrifice pour ramener un peu de gaité dans une maison qui part à la dérive tant elle est submergée par les flots de larmes.

Roman sur la perte d’une figure emblématique de la famille, il parle du chagrin, de la douceur des souvenirs et se termine sur des notes extrêmement positives.

Les illustrations de Violaine Leroy, apportent, en plus, une manière très poétique de dessiner le deuil et par dessus tout la vie.

Aux éditions du Rouergue, collection Zig zag (une belle collection qui laissent un place importante aux illustrations), 105 pages, 6€50, de 8 à 99 ans.

Tout le monde veut voir la mer

Oui, Agnès de Lestrade écrit aussi des romans plus « légers » où la lecture provoque des sourires qui ne vous lâchent pas.

Tout le monde veut voir la mer est arrivé fraichement dans ma librairie préférée, il y a quelques mois. C’est un coup de cœur car il a réconcilié ma fille de 9 ans avec la lecture.

Un roman vif, drôle, mais qui distille quelques réflexions à méditer ne pouvait que réveiller son goût de lire.

Marika , la jeune narratrice vit dans la cité des Muguets (bien qu’il n’y ait aucun muguet dans son quartier). Elle aime les chevaux et rêve d’équitation. Même si elle sait  que ce rêve est inaccessible, il lui « pince le cœur » et lui «  fait comme des papillons dans l’estomac ». Son plus grand souhait est de pouvoir galoper. Alors, forcément quand le secours populaire offre une journée à la mer aux enfants du quartier, elle ne voit aucune raison d’être heureuse et encore moins d’y aller. Oui « ce n’est pas parce qu’on est pauvre qu’on a forcément envie de voir la mer ! ».

Mais Marika est une jeune fille attentive aux autres et à leurs rêves. Aussi, quand son amie Sofia se met à pleurer et à la supplier de l’accompagner, elle se résout à vivre cette journée. Elle découvrira alors qu’il y a parfois des endroits où l’on ne veut pas aller mais qui regorgent de belles rencontres. « C’est drôle la vie. Il y a des choses qu’on n’attend pas, qu’on ne souhaite pas et qui pourtant vous emportent ».

Voilà, encore une fois je suis emportée par ces mots justes d’Agnès de Lestrade.

Les illustrations de Nathalie Choux accompagnent parfaitement ce texte : les personnages avec leurs grands yeux, observent les autres et le monde d’un regard curieux  et bienveillant.

Ce joli récit cache d’autres petites histoires : celles de la vie dans une cité, de l’Algérie que la maman de Marika garde dans un coin de ses rêves, de la pauvreté, de la fierté et du racisme. Et tout cela sans en faire des tonnes : quelques petites touches ici et là qui sont autant de jolies petites leçons de vie.

Aux éditions Rouergue , collection zig zag , 90 pages, 6€80 ; de 9 à  99 ans.

Voilà un petit bout du pourquoi j’aime Agnès de Lestrade. En plus j’ai lu qu’elle aimait mettre des boules Quiès et qu’elle écrivait dans son lit. Le talent en moins, je me reconnais dans ces quelques détails !