Journée de formation du 37e Salon du Livre Jeunesse de Beaugency

En avant-première du  37e Salon du Livre Jeunesse de Beaugency, une journée professionnelle autour du thème « Mondes en traduction, mondes en expansion» est organisée ce mercredi 09 mars au théâtre le puits-Manu, avec comme intervenants :

  • Julia Chausson, invitée d’honneur du 37e Salon du livre jeunesse Val de Lire dont elle a conçu les affiches,
  • Euriell Gobbé-Mévellec, maîtresse de conférence à l’université Toulouse II – Le Mirail et formatrice à l’ESPE Toulouse Midi-Pyrénées,
  • Mathilde Chèvre, directrice éditoriale, auteure-illustratrice et traductrice,
  • et Christophe Meunier, docteur en géographie, formateur à l’INSPE Centre-Val de Loire (université d’Orléans) et membre associé au laboratoire InTRu (Interactions, Transferts, Ruptures artistiques et culturelles) de l’université de Tours..

Cette journée est destinée aux « professionnels du livre, de l’enfance, de l’animation, mais aussi aux bénévoles associatifs, retraités, bref à tous ceux que la littérature jeunesse intéresse », en partenariat avec le Centre de Recherche et d’Information sur la Littérature pour la Jeunesse (CRILJ,).

Je partage donc ici, avec vous, le lien de Val de Lire  qui vous permettra d’en prendre tranquillement connaissance :

http://www.valdelire.fr/comprenhttps://valdelire.fr/journee-de-formation-du-9-mars-2022-inscriptions

je vous reparlerai plus en détail du Salon le moment venu ,-)

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En juin, les rencontres c’est opportun !

Roxane et l’Ouvre-Livres : une rencontre originale et agréable

 Rox avril 2014

Roxane est professeur documentaliste dans le Val d’Oise. Elle nous a contacté, il y a un moment déjà. Pour dire… c’était le 4 juin, l’an dernier. Elle nous a connu par l’intermédiaire de P. LOJKINE, sa directrice de thèse, à l’Université du Maine. Roxane ne nous a pas attendues – bien heureusement – pour croiser sa passion et ces « nouveaux » outils de communication et de partage que sont les blogs. Bien que nous lui ayons expliqué, avec délicatesse et politesse (ben oui, nous ne sommes pas des bêtes quand même…), que nous ne pouvions l’accueillir dans l’équipe des rédactrices de l’OL, nous l’avons encouragé à poursuivre l’aventure de ses différents écrits, très, très studieux, professionnels ou un peu moins*.

Par contre, nous lui avons laissé l’exclusivité d’inaugurer une nouvelle rubrique de l’OL, celle de « l’invité(e) du mois » ! C’est désormais à elle de se lancer…

* En effet, Roxane a un blog « Feuille de blog », qu’elle alimente comme elle nous l’explique du mieux qu’elle peut. Ben nous, à l’OL, on trouve que c’est déjà extra ! Une vraie modeste cette Roxane. 😉  

 

L’OL : Quel est ton parcours universitaire ?

Après l’obtention d’un baccalauréat Littéraire, option musique, j’ai étudié à l’Université de Cergy-Pontoise dans le Val d’Oise. J’ai obtenu une licence de Lettres modernes, option communication, médiation culturelle et édition en 2006. J’ai ensuite poursuivi en Master recherche « Littératures du monde francophone ». J’ai présenté un mémoire de recherche intitulé L’Idéal Féminin dans trois œuvres du XIXe siècle : Représentation et Utopie à partir de Sylvie de Gérard de Nerval, Fort comme la mort de Guy de Maupassant et Bruges-la-Morte de Georges Rodenbach. J’ai repris mes études en 2014 à l’Université du Maine où je prépare un doctorat en Littérature française en enseignement à distance.

Voir par ici : Pg de présentation 2

L’OL : Quel est ton parcours professionnel ?

L’arrivée sur le marché du travail en 2008 n’était pas facile en raison de la crise économique. J’ai tout de même obtenu un emploi après cinq mois de recherche active, à la DRH de l’Université de Cergy-Pontoise grâce à la recommandation de ma directrice de mémoire. J’étais très intéressée par les Ressources Humaines mais la réalité sur le terrain ne me convenait pas. Je me suis rendue compte, en écoutant mes amies qui étaient devenues professeures de français ou des écoles, que je voulais également enseigner. J’ai donc présenté le CAFEP de documentation : le métier de professeur documentaliste m’intéressait davantage que celui de professeur de français. En effet, la variété des missions, l’éducation aux médias et à l’information, le travail sur les sources, la pédagogie de projet et surtout l’ouverture culturelle laissent une grande marche de manœuvre et permettent un travail avec toutes les disciplines. Je pense que la principale qualité du professeur documentaliste doit être la curiosité (culture, informations, littérature, pédagogie et TICE) car il est un médiateur qui incite les jeunes à lire et découvrir ; et de manière beaucoup plus large, sa veille documentaire touche l’ensemble de l’établissement. Je suis professeur documentaliste dans un Collège lycée catholique sous contrat d’association avec l’Etat dans le Val d’Oise depuis 2011. Je prépare également des lycéens à l’épreuve facultative Cinéma-Audiovisuel depuis la rentrée 2014 et propose des Ateliers Cinéma d’animation avec une professionnelle au Centre des Arts d’Enghien-les-Bains. Je viens d’obtenir la certification complémentaire Cinéma et Audiovisuel.

Voyage au CDI

L’OL : Quel est le sujet de thèse sur lequel tu travailles ? Et, pourquoi avoir choisi ce sujet ?

Mon sujet de thèse s’intitule Contes « féminins » et transferts médiatiques : perspectives culturelles et didactiques. J’ai choisi ce sujet tout simplement par passion : je suis une grande lectrice de contes merveilleux et je m’intéresse depuis longtemps aux adaptations cinématographiques, musicales et littéraires. Ma recherche comporte un volet didactique en lien avec ma profession puisqu’il s’agit également de travailler sur l’utilisation du conte en classe.

L’OL : Quelle est l’implication de la Littérature pour la jeunesse dans tes pratiques professionnelles ? Très présente ? Indispensable ? Etc.  

Je travaille au CDI du lycée et je constate que les élèves grands lecteurs sont de plus en plus rares. En première, les élèves consacrent beaucoup de temps à préparer le baccalauréat de français et ont beaucoup de classiques à lire. J’essaie de leur proposer des ouvrages qui puissent les faire renouer avec la « lecture plaisir ». Les élèves de mon lycée ont grandi avec Harry Potter et aiment les romans fantasy. En dehors de ce genre, les romans de Littérature jeunesse sortent peu. J’essaie de varier les genres et les thèmes. Pour choisir de nouvelles acquisitions, je consulte la revue professionnelle InterCDI, les avis sur les blogs des collègues et le site Babelio. J’apporte également une grande importance aux conseils des libraires avec qui je travaille. De même, j’implique les élèves dans le choix des ouvrages en prenant en compte leurs suggestions. De nombreuses BD sont proposées au CDI, mais les élèves préfèrent les mangas : j’ai créé un Club Manga en 2012 et le succès est toujours au rendez-vous ! Les élèves demandent sans cesse de nouveaux mangas. Ce Club me permet de leur présenter des œuvres de littérature japonaise, des documentaires mais aussi de proposer des activités autour de la lecture comme par exemple la rédaction d’articles ou la réalisation de book-trailer (une bande-annonce de livre, sous forme de courte vidéo).

L’OL : C’est quoi pour toi la Littérature pour la jeunesse ? Ça représente quoi ? C’est une passion, une vocation, une admiration… ?

La littérature de jeunesse est l’ensemble des œuvres éditées pour la jeunesse. La littérature de jeunesse s’adresse aux enfants lecteurs mais également aux enfants apprentis lecteurs. Les œuvres de littérature jeunesse relèvent de différents genres (albums, conte, fable, poésie, roman, récit illustré, théâtre, BD ou encore manga) qui se déclinent selon les différents âges. On entend de plus en plus parler de roman jeune adulte, créneau éditorial qui remporte un vif succès. Le substantif « littérature » inscrit donc la littérature de jeunesse dans une perspective littéraire. D’ailleurs, depuis 2002, des listes d’ouvrages sont proposées aux enseignants par le Ministère de l’Education nationale.

(Sur l’OL, Gaëlle avait proposé un article sur la littérature « crossover », pour jeunes adultes : https://ouvrelivres.wordpress.com/2016/04/07/comics-crossover-for-ever/)

La littérature jeunesse représente pour moi des œuvres qui permettent de développer l’imaginaire tout en proposant une certaine représentation du monde. J’aime reprendre cette citation de Daniel Pennac extraite de Comme un roman : « Nous lui avons tout appris du livre en ces temps où il ne savait pas lire. Nous l’avons ouvert à l’infinie diversité des choses imaginaires ». Lire, c’est donner les mots et offrir des images. Lire, c’est donner à voir et à comprendre le monde.

L’OL : À ton avis, quel rôle la Littérature de jeunesse peut-elle jouer ou joue-t-elle socialement dans notre société, notre actualité… ?

Lorsqu’on lit un ouvrage de littérature jeunesse à un enfant, il s’agit d’un moment unique. L’enfant s’éveille, fait travailler son imaginaire, pose des questions, apprend et comprend. La lecture comporte une fonction éducative et sociale. Il est également important de souligner que la littérature jeunesse est reliée à l’image qu’il s’agisse d’albums illustrés, de BD ou mangas. Lorsque l’enfant est capable de lire seul, il peut choisir les œuvres de littérature jeunesse relevant d’un genre qu’il affectionne, ou traitant d’un thème qui l’intéresse. La production éditoriale actuelle est très variée et protéiforme, chacun peut s’y retrouver. Les sujets abordés et les univers proposés en littérature jeunesse sont très nombreux. Je pense que certaines œuvres peuvent permettre aux jeunes de comprendre le monde, l’histoire et les différents phénomènes de société.

Je ne suis pas toujours convaincue par les romans adolescents car je trouve que certains récits sont affreusement dramatiques. Mais il en faut pour tous les goûts et il ne faut pas « juger » les lectures des enfants – il faut au contraire les encourager ! Cette diversité éditoriale me semble donc essentielle. Il ne faut pas oublier la notion de lecture plaisir. Cette volonté a d’ailleurs été réaffirmée dans les programmes de 2008. Lire ne doit pas être synonyme de contrainte.

L’OL : Quels sont les ouvrages de Littérature pour la jeunesse que tu lis le plus (albums, romans, documentaires, BD…) ? Que tu lis le moins ? As-tu des regrets par rapport à cette dernière question ?

Je m’intéresse particulièrement aux albums de conte, BD, mangas et romans adolescents. Je lis beaucoup de BD et mangas car ce sont les genres qui sont le plus appréciés par les élèves de mon établissement et j’aime pouvoir parler des livres que je propose au CDI. Je lis beaucoup la presse, ce qui empiète sur mes autres envies de lecture. J’aimerais pouvoir lire plus de romans et proposer aux élèves davantage de titres contemporains, pas forcément de littérature de jeunesse. Je regrette mon manque d’intérêt pour la fantasy alors que ce genre plaît beaucoup aux adolescents ! Je me rattrape avec les dystopies qui sont très à la mode. Katniss Everdeen et Tris Prior sont les nouvelles héroïnes des adolescent(e)s.

L’OL : Quel est ton coup de cœur Lije 2015 ?

La Malédiction Grimm de Polly Shulman (Bayard). Il s’agit de l’histoire d’Elizabeth, une lycéenne, qui trouve un petit job dans une étrange bibliothèque new-yorkaise qui contient en réalité des objets. La Collection Grimm semble cacher un secret, Elizabeth et ses nouveaux amis décident de percer ce mystère.

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L’OL : Quels sont tes auteurs, illustrateurs… préférés ?

Je suis très sensible aux romans de Yaël Hassan qui sont très émouvants.

J’adore le style de David Sala qui m’évoque Gustav Klimt. Son illustration de La Belle et la Bête (Albums Casterman) est sublime. De même, j’ai été transportée par la modernité des dessins de Mayalen Goust illustrant Blanche-Neige (Classiques du Père Castor chez Flammarion).

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Enfin, dans un autre registre, je suis une grande lectrice de l’œuvre de Philippe Geluck. Je ne passe pas une journée sans lire un strip du Chat !

L’OL : Quelle(s) est/sont la(les) maison(s) d’édition Littérature pour la jeunesse pour lesquelles tu fais attention aux sorties, aux parutions, aux nouveautés ?

En ce qui concerne les albums, j’apprécie toujours autant les Classiques du Père Castor (Flammarion) – voire le très bel et fidèle album Raiponce d’après les frères Grimm qui vient de sortir – et les albums Gautier-Languereau (Hachette).

Je surveille les nouveaux romans publiés chez Bayard et PKJ. Côté manga, je suis Glénat, Ki-oon, Pika et l’éditeur français Ankama qui a publié City Hall.

L’OL : Quel auteur/illustrateur as-tu eu la chance de rencontrer et qui t’a réellement marquée ?

Bien entendu, j’ai déjà rencontré des auteurs, illustrateurs et scénaristes dans le cadre de mes études, salons ou de rencontres organisées au lycée. Ces moments ont été importants, mais celui qui m’a le plus marquée reste la cérémonie où le poète libanais Salah Stétié a été fait Docteur Honoris Causa à l’Université de Cergy-Pontoise en 2009.

L’OL : Quel est ton meilleur souvenir d’enfance de lecture jeunesse ?

Il s’agit d’Anne la maison aux pignons verts et les autres tomes de la saga de la romancière canadienne Lucy Maud Montgomery. Cette œuvre m’a beaucoup marquée car je me suis identifiée au personnage d’Anne. On parle d’identification emphatique, c’est-à-dire que le lecteur se met à la place « de ». Le lecteur, jeune ou adulte, établit des liens entre son expérience et le vécu du personnage. Au delà de cet aspect, le personnage d’Anne constituait pour moi un modèle, avec ses qualités et ses défauts !

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L’OL : Si tu étais un personnage / héros de littérature jeunesse, lequel serais-tu ?

Anne incontestablement !

L’OL : Quelle est ton année 2016 de littérature pour la jeunesse ? Tes projets, tes envies, tes lectures… ?

J’aimerais trouver le temps pour lire plus de fictions. Ma prochaine lecture LIJE sera Les Petites reines de Clémentine Beauvais (meilleur livre jeunesse 2015 Lire et Prix NRP) que je viens de commander pour le CDI.

(déjà « croqué » sur l’OL : https://ouvrelivres.wordpress.com/2015/07/11/les-petites-reines-clementine-beauvais-sarbacane-coll-exprim/)

L’OL : Peux-tu nous parler de ton blog ? Le pourquoi de sa création ? Tes envies ? Tes difficultés ?…

J’ai créé mon blog en 2009, après avoir terminé mes études. Il n’est pas uniquement lié à la littérature. On y trouve des critiques (films, expositions, concerts et livres) et quelques actualités. J’ai ouvert ce blog pour continuer à écrire et m’essayer – petitement – à la critique. Je l’ai appelé Feuille de blog et son sous-titre est implicite Petit aperçu de mes goûts et dégoûts artistiques et culturels. Je précise qu’il n’a aucune valeur scientifique et est sans rapport avec mon travail de recherche. Il s’agit d’un espace où j’écris en toute subjectivité à partir des actualités artistiques, culturelles et littéraires.

Lien : http://roxane-feuilledeblog.blogspot.fr/

J’ai ouvert un blog professionnel que je n’ai pas pu tenir faute de temps. Le manque de temps est la difficulté principale que je rencontre, aussi bien pour la lecture que pour la mise à jour de Feuille de blog.

« What Else ? »

Une citation de Jules Renard qui résume bien notre entretien et l’esprit de L’ouvre-livres :

« Quand je pense à tous les livres qu’il me reste à lire,

j’ai la certitude d’être encore heureux ».

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Passe de belles vacances et profite de tes nouvelles lectures Roxane, et encore merci !

Ma vie de libraire pour la jeunesse # 1. À bas les clichés !

Bienvenue dans ma vie de libraire !

Cet article s’inspire de plusieurs vies de libraires, les miennes.  En librairie dite de Grande Surface Spécialisée, puis en librairie généraliste, puis en spécialisée jeunesse. Toutes pareilles et pourtant toutes différentes !

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Oui, c’est moi ! En mode Marvel, un jour de pétage de plombs. Attention, on ne s’amuse pas tous les jours non plus !

Il s’agit ici du premier article voué à faire connaître un métier qui fait fantasmer bien des gens. C’est justement pour faire prendre conscience des réalités que j’ai décidé de vous livrer un portrait assez peu glamour mais 100% véridique de mon gagne-pain.

Li-braire !

Avouez que ça fait rêver. Ça en jette, non ? Je suis parfois prise d’une envie de faire ma maligne lorsqu’on me demande « Et toi, tu fais quoi comme boulot ? » En réponse, j’ai l’impression de prononcer une simili formule magique « Oh, moi tu sais, je suis libraire pour les enfants… » Puis,  j’ai pris l’habitude après avoir écouté les « T’as trop d’la chance ! Ça doit être trop coooooool comme boulot ! » (oui c’est vrai), de vite calmer les ardeurs de mes fans. Salaire minable, boulot épuisant, horaires de commerçant, vacances de commerçant, patience en toutes circonstances pour gérer les désirs des clients, etc…

Mais c’est vrai que j’ai de la chance d’être libraire, c’est un boulot cool et de passion. Franchement, y a pire. Mais avant de vous décider à venir vivre ma vie de libraire dans votre vraie vie à vous, lisez cet article et celui de Télérama intitulé Profession : libraire fier qui donne un bon aperçu du métier. Même si le terme « fier » dans le titre me fait grincer des dents car j’ai du mal avec l’importance que certains donnent à ce métier car enfin, soyons honnêtes, on ne vend que des livres. Je ne vois nulle mission sacrée ou acte de bravoure là-dedans.

Avant tout, vous qui pensez à devenir libraire, demandez-vous si vous êtes vraiment passionné de livres et non pas de lecture et encore moins d’un genre de lectures en particulier… Je m’explique : on peut-être un fan absolu de SF, lire 150 romans de SF dans l’année et vouloir passer sa vie à en conseiller dans une librairie et puis… on se retrouve dans une librairie généraliste au rayon dictionnaires (je n’ai rien contre les dictionnaires).

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On ne tombe pas toujours du premier coup au poste escompté, surtout dans les GSS ou les librairies généralistes. Alors, je pense que l’amour du LIVRE est essentiel, ça parait bête de dire ça, n’est-ce pas ? Il faut aimer le renifler, le tripatouiller, ok bon, j’arrête. Nul besoin d’être fétichiste non plus.

Si vous êtes vraiment passionné par la chose livresque alors vous pourrez certainement vous accommoder de votre paie au SMIC, de vos samedis travaillés, de vos 5-semaines-de-congés-pas-une-de-plus, de vos centaines de kilos de cartons portés chaque semaines, de vos clients de mauvaise humeur, du téléphone qui sonne toujours au mauvais moment (fonctionne aussi avec la cb qui tombe en panne au mauvais moment, l’ordi, la caisse etc…) Vous ferez le ménage avec délice en fin de semaine, irez à la déchèterie en sifflotant vous débarrasser des tas de cartons évoqués plus haut. C’est encore et toujours la passion qui vous aidera à vous lever les dimanches à l’aube pour aller sur les divers salons du livre pour lesquels des semaines de préparation sont nécessaires et une journée entière de remise à neuf de la librairie au retour. Et j’en passe.

Donc de la passion, sinon c’est cuit.

Quand je vois le nombre de personnes qui rêêêêêêvent de faire ce boulot lorsque j’en parle, je m’aperçois que l’image qu’en a une bonne partie de la population est terriblement déformée.

Voici selon moi les pires clichés véhiculés (et un brin exagérés je l’avoue) auxquels j’apporte mon vécu…

Idée reçue numéro 1: pour être libraire il faut être très intelligent.

Même pas ! J’en connais qui n’ont pas le bac mais je ne dirai pas qui. Pour être libraire, il faut surtout être curieux et avoir de bonnes connaissances de culture générale.

Exemple : si vous soutenez à un client que Stendhal n’a jamais écrit Le rose et le vert et que vous lui ricanez au nez en lui disant c’est Le rouge et le noir ! , vous aurez l’air idiot car ça existe bel et bien… Idem avec un autre piège de nos classiques de la littérature française, notre ami Molière a bien écrit L’école des maris bien qu’on nous demande toujours celle des femmes.

Mais bon, pas de panique car quand on débute on ne peut pas être une encyclopédie non plus. Et même au bout de xxx années de carrière, il y aura toujours un client qui en saura plus que vous sur un sujet et ne manquera pas de vous le faire remarquer. C’est agaçant mais au moins, dans mon boulot, j’en apprends tous les jours et tous les soirs je me couche un peu moins bête. N’est-ce pas formidable ? Donc, il faut en avoir dans le ciboulot mais on n’a pas besoin de réviser l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert non plus. Quoi que avec celle magnifique publiée par l’Edune l’an dernier, on s’y met avec plaisir. lumières

Dans les faits, pour être libraire il n’y a pas forcément besoin d’un diplôme MAIS les DUT Métiers du livre par exemple sont appréciés. On peut trouver des formations dès le CAP, suivez le lien ici pour voir la liste des formations. Vous voyez, il y en a pour tous les goûts. Pas besoin de se lancer dans un cursus de lettres modernes et ça, c’est pas une chouette nouvelle ? Donc, non pour être libraire, pas besoin de faire de longues études. Le plus dur c’est de trouver du boulot car on est serrés comme des sardines.

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Les formations en alternance sont, sur le papier, une super idée. Dans les faits je connais malheureusement peu de libraires qui prennent des apprentis. Le plus dur est de trouver celui qui voudra faire de vous son petit protégé. Sollicitez les librairies auxquelles personne ne pense, celles cachées dans un petit village en périphérie où un libraire galère tout seul et voudrait bien un peu d’aide…

Idée reçue numéro 2 le libraire lit beaucoup

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Le libraire lit quand il peut mais jamais au travail…

Alors ça c’est forcément vrai, je vous faisais une petite blague. Le libraire lit beaucoup mais je voulais préciser une petite chose loin d’être anecdotique : le libraire ne lit jamais pendant son temps de travail ! Ou alors c’est un petit veinard. Personnellement, je n’en connais pas qui ont le temps de bouquiner pendant les heures d’ouverture. Le libraire lit donc en dehors de son travail, dans son lit par exemple jusqu’à ce qu’il s’écroule de fatigue. Ou à la plage, ou dans son canapé. Où il veut mais pas au boulot. Donc on fait beaucoup d’heures supplémentaires non rémunérées. Mais vous allez me dire « quand on aime on ne compte pas ». Je l’attendais celle-là mais je préfère ne pas y répondre. Dans le cas où l’on est « spécialisé jeunesse » puisque c’est de ça dont on parle dans ce blog, j’en viens carrément à culpabiliser lorsque je prends le temps de lire un bouquin pour adultes.

ça te saoule pas de lire que des livres pour les gosses ?

Me demande-t’on parfois à juste titre (la réponse est oui ET non)

Je ne m’autorise que les congés d’été pour lire du « pour les vieux…  » Le reste du temps ça m’angoisse et me donne l’incroyable sensation de prendre trop de retard sur toutes les nouveautés si je ne carbure pas à la jeunesse. Ce qui m’amène à l’idée reçue suivante.

Idée reçue numéro 3 : le libraire connait tout (même pas vrai)

Alors celle-là, je l’entends toutes les semaines : »Demande à la dame mon chaton, elle connaît tous les livres. » Ou sa variante lorsque l’on conseille : « Mais vous avez lu tous les livres ? »

Et bien non le libraire ne connait pas tout et n’a pas lu tout ce qui est dans sa boutique… Mais normalement au bout d’un certain temps et s’il sait bien faire son boulot, il est capable de répondre à un peu tout. Par quel miracle ? Et bien déjà, suis-je autorisée à dire « tous les Nothomb se ressemblent ? » N’allez pas croire que j’ai une dent contre Amélie, je veux juste dire par là que généralement on se fait vite une idée du style d’un auteur par exemple, de l’identité d’une collection. Si vous aimez machin alors vous aimerez bidule (oui, comme sur les propositions de libraires par internet, c’est dingue !) Par exemple : si vous aimez Musso vous aimerez Lévy.

Et puis, normalement le libraire se tient au courant (magazines, blogs, etc…) et sait donc ce que machin ou bidule qui est hyper renommé dans le monde de la littérature en a pensé. Lorsque je ne peux pas donner mon avis mais que j’ai lu un bon article dessus, j’en parle. Attention ! Je n’ai pas dit que je faisais semblant d’avoir lu le livre en mettant dans ma bouche les propos de Michel Abescat dans Télérama !!! Je suis toujours honnête même si ça apporte parfois la réaction que je déteste : « Ah bon, vous ne l’avez pas lu ? » « Non madame, mais j’en ai lu d’autres vous savez… » On dirait que le monde s’écroule lorsque l’on ose dire non.

Et puis ce sont aussi souvent les mêmes que l’on conseille car nous avons bien sûr nos chouchous. Ce qui ne nous empêche pas de savoir aussi nous débrouiller lorsque l’on nous demande des conseils sur des choses qui nous inspirent moins. Et ça ça arrive quand même assez fréquemment car on ne tombe pas toute la journée sur des lecteurs avec qui l’on peut partager ses affinités. Et un fin libraire, à mon sens, ne tentera pas le diable en proposant à un fan de 50 shades of grey de tenter dans la foulée Belle du seigneur. Je pars du principe qu’il faut respecter les lectures des clients et y aller mollo dans leur reconversion.

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J’avoue j’ai pas tout lu. Quoi, vous n’allez pas me dire que vous avez lu tous vos livres quand même ?

Idée reçue numéro 4 : le libraire aura bien un livre pour régler le problème du petit.

Votre enfant mord ? Il ne veut pas jeter sa tétine ? Votre fille ne veut plus se montrer toute nue ? Votre fils est mauvais perdant ? Votre chien est mort ?
Pas de panique le libraire a des livres pour toutes les situations et c’est presque vrai. Grâce à la série de chez Calligram Ainsi va la vie -que tout le monde même moi appelle Max et Lili-, on trouve de tout.  Mais alors vraiment de tout. Même si la mère de la meilleure amie de votre fille picole ou si le neveu de je ne sais pas qui est en prison, c’est tout bon. Grâce à Max et Lili on est sauvés ! Pour tous les âges les auteurs et éditeurs proposent des titres pour soigner tous les maux. Le libraire doit jouer au psychologue avec certains clients et faire preuve de tact dans des situations parfois bien difficiles. Divorce, maladie, décès, beaucoup de familles confrontées à des situations compliquée cherchent un livre pour aborder des sujets délicats avec leurs enfants.  Pas toujours simple de répondre à toutes les demandes et de trouver le livre adéquat. Pour les plus grands il va falloir « taper » dans les romans, trouver le titre auquel s’identifier au héros. Bon, pas simple tout ça. Et en plus c’est même pas sûr que ça marche… Il y en a qui croient dur comme fer au livre médicament. Je reste un peu plus sur la réserve selon les demandes et me retient parfois de conseiller aux parents un pédo-psy plutôt que d’essayer d’éradiquer la jalousie maladive de l’aîné qui mord le nouveau né à coups de Trotro à une petite sœur.

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Madame la libraire ! Au secours mes enfants se sont transformés en félins, qu’est-ce que je peux leur lire ?

Je pourrais mettre encore ici bien des idées reçues sur mon métier mais j’en garde pour la suite ! Il faut savoir tenir en haleine ses lecteurs.

Je vous donne quand même un SPOILER en attendant le #2 : libraire, un chouette métier… Dans le prochain post : votre libraire balaie (tout en décrochant le téléphone et en disant au revoir avec le sourire à la madame qui s’en va).